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CHRONIQUE n° 63 - 01/04/2006
DES CONTRADICTIONS BIEN CURIEUSES À PROPOS DE SAINT-SAËNS


Certains articles accompagnant des documents discographiques d'oeuvres de C. Saint-Saëns nous paraissent bien significatifs de la différence que nous croyons voir entre le jugement et la réalité de l'oeuvre. Ainsi en est-il, pensons-nous, de celui d'Y. Tiénot. Cet auteur écrit à propos du "Concerto n°5 pour piano et orchestre":

Il est coloré d'exotisme et parsemé d'emprunts à des rythmes et modes orientaux qui ont peut-être favorisé son essor en flattant les goûts d'un public sensible au charme facile qui s'en dégage.

Plus loin, nous trouvons:

Dans le développement interviennent des formules mêlées à des gammes chromatiques un peu académiques.

On trouve plus loin encore à propos du 3ème mouvement de cette oeuvre que la virtuosité domine et l'emporte sur la qualité des idées.

Il nous semble qu'apparaît une contradiction lorsque l'on allègue contre C. Saint-Saëns, à propos d'une même oeuvre, toutes les idées communes contre la virtuosité, le manque de profondeur, la recherche des effets faciles... et qu'on la taxe d'académique. Dans le même esprit, les jugements sur C. Saint-Saëns dans l'ouvrage de F. Robert La musique française au XIXème siècle n'apparaissent-ils pas très arbitraires?:

Il [C. Saint-Saëns] compose avec une habileté suprême [...], fut-ce pour ne rien dire.

Pourquoi tant de désinvolture et de mépris à l'égard d'un compositeur? Plus loin, nous trouvons:

Il déploie exceptionnellement sa maîtrise au service d'un romantisme tempéré et tient compte cette fois, par quelques touches harmoniques discrètes, des innovations de Liszt et de César Franck.

F.J. Fétis reprochait à C. Saint-Saëns un réseau de dissonances, de cadences évitées qui fait perdre de vue la tonalité et qui déroute l'oreille. La critique d'Adolphe Julien, contemporain de Fétis, fait apparaître la même contradiction:

Ce n'était qu'effets de timbres et de rythmes, que curieuses combinaisons d'orchestre, bref une musique qui frappait l'oreille sans rien dire à l'esprit.

Les contemporains de C. Saint-Saëns semblent lui reprocher un excès d'originalité (négative selon eux) en même temps que son académisme! Que conclure? Le propos de F. Robert dans le même ouvrage cité précédemment La musique française au XIXème siècle nous paraît encore plus frappant:

Ceux-ci [les poèmes symphoniques de C. Saint-Saëns] valent d'abord par leur forme impeccable

Il nous paraît incontestable qu'un poème symphonique, contrairement à une sonate ou une symphonie, est un genre libre par excellence qui n'a pas de forme définie. Par ailleurs, F. Robert accorde à V. d'Indy le génie qu'il refuse à C. Saint-Saëns. Nous pensons pour notre part que, malgré ces affirmations, F. Robert, pas plus qu'E. Hanslick, J.S. Fétis et tous les musicographes du monde, ne pourront jamais empêcher le public d'être séduit par des oeuvres comme le Carnaval des animaux, le Concerto n°2 pour piano et orchestre, l'Andante et rondo capriccioso... alors qu'il est souvent ennuyé par la musique de Vincent d'Indy dont aucune oeuvre n'a obtenu un succès comparable à celles de C. Saint-Saëns.


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