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CHRONIQUE n° 84 - 01/2008
COMMENT RECONNAÎTRE LES MANIFESTATIONS
DU GÉNIE MUSICAL DANS L'HISTOIRE


Le but auquel aspire l'analyste est de reconnaître à travers l'hisoire la manifestation du génie par des critères purement intellectuels. Mais l'art ne se manifeste-t-il pas toujours de manière contradictoire et aléatoire. Il ne s’exprime sans doute pas toujours où on l’attend (voire même jamais), ni sous la forme que l’on imagine. Tel grand compositeur peut-être ne produira que quelques grands chefs-d’œuvre (ou même un seul majeur) au milieu d’une production globale médiocre que le néophyte et encore plus l’Intellectuel, couvriront d’une vénération sans objet. Tel compositeur de génie sera glorifié de son vivant, tel autre restera inconnu. Tel compositeur sera justement oublié dès sa mort, tel autre sera injustement oublié dès sa mort. Il semble qu’aucune règle générale, aucune loi, aucune méthode de jugement à partir d’éléments extérieurs à l’œuvre, ou d'éléments internes afférents à l'analyse de l'oeuvre elle-même, ne puissent être appliquées au phénomène artistique. Ni le succès auprès du public, ni l'insuccès auprès du public, ni la décantation par le temps, ni l’approbation de la critique, ni la désapprobation de la critique, ni l’encensement par les musicographes, ni le dédain des musicographes, ni le genre, ni l’époque... La notoriété d’un compositeur au cours des siècles pourrait procéder de la théorie du chaos. Il semble que se soient produits au cours de l’Histoire des points de cristallisation sur quelques compositeurs, dus à une multitude de facteurs annexes qui ne sont pas associés à une logique particulière et que l’on pourrait assimiler à un hasard. D’une manière générale, l’on doit accorder, pensons-nous, plus de confiance au succès auprès du public qu’aux décrets des spécialistes, le public de la musique classique, bien évidemment, très éloigné du public des manifestations tapageuses et populistes des genres non-classiques. Précisons que ce succès à notre avis peut revêtir sans doute plus de signification s'il est acquis du vivant du compositeur. Un succès posthume nous paraît plus susceptible d'être entaché par l'influence des médias ou médiateurs (associations de soutien, écrits des musicographes...). D'autre part, il nous semble que l’on doive suspecter les compositeurs systématiquement vénérés avec une ferveur quasi mystique ou idéologique, ceux qu’on loue beaucoup et que l’on écoute peu, ceux dont on clame le génie à la manière d'une vérité apodictique. Si l'on excepte ces préventions, nul espoir donc de découvrir les véritables oeuvres géniales autrement qu'en s'immergeant en elles par l'expérience esthétique individuelle, sans référence rassurante à une autorité supérieure. À moins que l'on utilise une méthode paradoxale consistant à observer les allergies d'une catégorie spécifique de mélomanes. Certaines personnes paraissent en effet manifester un flair infaillible pour détecter le génie afin de le conspuer. Elle n'aiment pas les oeuvres lyriques ou rhapsodiques qui leur apparaissent grandiloquentes et théâtrales. L'expression du sublime provoque chez elles un malaise indéfinissable, un état d'incompréhension angoissant. Elles considèrent comme superficielles les oeuvres qui transcendent les mélomanes sensibles. Ne pouvant les comprendre, elles les condamnenent, à moins qu'elles ne les considèrent avec commisération sous la catégorie des oeuvrettes attractives, simples, mélodiques à la mesure d'esprits limités.


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