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CHRONIQUE n° 29 - 06/2003
BERLIOZ NÉGLIGEABLE OU FONDAMENTAL DANS L'ÉVOLUTION DE LA SYMPHONIE?


L'attribution d'une nouveauté musicale, en considération de l'exhumation de nombreuses partitions, permet aujourd'hui d'avancer des conclusions d'une certaine autorité dans le cas de novations bien définies. Ainsi en est-il, par l'exemple, de l'origine du concerto de soliste attribuée à Torelli, la disparition de la basse continue à Boccherini, d'après l'état actuel de nos connaissances tout au moins. En revanche, l'attribution de l'invention d'un style et de ses prémisses nous paraît encore appartenir au domaine assez flou de l'interprétation personnelle de l'historiographe. Il nous semble que les auteurs, notamment ceux de la première moitié du 20e siècle, peuvent affirmer à propos d'une oeuvre des caractéristique exactement contraires à ce qu'elle peuvent être. L'explication de ce paradoxe nous paraît être la nécessité de faire apparaître les compositeurs choisis par l'intelligentsia traditionaliste comme novateurs, lyriques, expressifs, émouvants, voire même virtuoses, plus que ceux qui ont naturellement cette vocation. Un autre exemple manifeste qui montre, selon nous, le faible degré de certitude que l'on peut accorder à la recherche sur la genèse des styles est la différence d'appréciation sur l'importance historique d'une oeuvre dans l'évolution de la musique. Par exemple, A. Louvier considère la Symphonie fantastique comme une étape importante de l'évolution du langage musical puisqu'un chapitre de son ouvrage L'orchestre est intitulé: La révolution berliozienne. En revanche, M. Chion dans le premier chapitre Les paradoxes de la symphonie à l'ère romantique de son livre La symphonie à l'époque romantique passe quasi-directement de L. van Beethoven à R. Wagner. La différence de point de vue entre les deux ouvrages a de quoi surprendre le lecteur non averti s'imaginant que l'histoire de la musique pût être une science rigoureuse. Sur un autre exemple, en demeurant prudent, j'oserais avancer qu'on n'a pas rendu suffisamment justice aux compositeurs nordiques prédécesseurs de Wagner, Berwald et Gade notamment. Sibelius, qui exploita incomparablement ces mêmes effets de lenteur et d'arythmie, n'eut pas à les emprunter à Wagner, qu'il détestait d'ailleurs. L'on pourrait également imputer à Paganini l'usage innovant du chromatisme attribué à ce même Wagner dans son Tristant si l'attribution d'une nouveauté à un violoniste-compositeur n'était pas une incongruité inadmissible. Le Dictionnaire de la musique sous la direction de Marc Vignal (Larousse, 2001) signale cependant l'importance particulière du chromatisme chez le Génois, presque un demi-siècle avant le créateur de la Tétralogie. Observant ces hésitations et contradictions, l'on est tenté de considérer avec circonspection les influences d'un grand compositeur sur un autre grand compositeur, reléguant toujours les mêmes dans la lumière de la gloire et toujours les mêmes dans les ténèbres de l'oubli ou la déconsidération.


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