SOMMAIRE


LÉGENDE DES APPRÉCIATIONS SUR LES OEUVRES


- : peu intéressant

* : assez bon

** : bon

*** : excellent

**** : exceptionnel


Exemple pour une oeuvre en plusieurs mouvements :

Concerto (*/*/-/*)

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MAHLER Gustav (1960-1911)


ORCHESTRE

Malher se révèle sous un jour très différent d'une œuvre à l'autre. Le polymorphisme de ces œuvres, qui peuvent témoigner aussi bien du lyrisme le plus intense comme de sa négation la plus absolue, pose un problème insolubre et constitue un mystère. Difficile de croire que cet ensemble hétéroclite soit le fruit d'un seul compositeur. Les symphonies n°4 et n°5 ne représentent guère à mon avis qu'un déploiement symphonique vide de thème et confinant parfois à ce qui me paraît être un superficialisme assez stupéfiant. On peut y déplorer des dysharmonies incompréhensibles, à moins qu'il ne s'agisse de provocation ou encore d'un essai hasardeux vers un modernisme assez vain. Ce style étale à mon sens un esprit canaille assez désagréable. En contraste, la Symphonie n°9, sans grand relief à mon avis, relève du style classico-romantique le plus neutre. C'est dans la symphonie n°6 et la Symphonie n°10, que se manifeste, me semble-t-il, le génie de Mahler. Dans cette dernière œuvre d'inspiration wagnérienne, le compositeur manifeste de manière achevée son art des juxtapositions stylistiques saisissantes, des ruptures thématiques osées, des brisures inopinées. Son orchestration est nerveuse, variée, colorée, atteignant parfois une véritable orgie symphonique. Le pathétisme intense de cette œuvre m'apparaît fort éloigné du ton dépourvu de toute affectivité qui caractérise les autres symphonies (4 et 5). En cela, et par de nombreuses autres affinités stylistiques, Mahler, à mon avis, rappelle beaucoup Anton Rubinstein.

Symphonie n°1    (*/-/-/*)

Très peu mahlérienne, très classico-romantique, cette œuvre ne semble guère se différentier du style de l'époque. Si le wagnérisme n'y est pas absent, notamment dans le dernier mouvement, il serait sans doute outré de classer Mahler parmi les post-wagnériens en considération de cette symphonie. La marque wagnérienne - qui d'ailleurs n'est que la réutilistion de certains effets de musique nordique - n'apparaît pas signer particulièrement l'œuvre. Rien, d'autre part, ne pourrait préfigurer le fameux histrionisme futur de Mahler. On remarquera de nombreux passages mélodiques. Une orchestration dans l'ensemble souple, huilée, présentant une belle facture, sans aucun effet outrancier, mais j'avoue que rien ne me paraît recéler la moindre émotion. On peut admirer un certain déploiement orchestral (notamment dans le dernier mouvement) mais c'est une admiration qui, pour ma part, n'entraîne pas l'adhésion.

Symphonie n°2    (**/-/-/-/-)

Symphonie n°3    (*/-/-/-/-/*)

Symphonie n°4    (-/-/-/-)

Symphonie n°5    (-/-/-/-/-)

Symphonie n°6 1903    (**/*/*/-)

Un Mahler transfiguré par rapport à celui des symphonies 5 et 6. Des motifs sublimes, au thématisme déstructuré parfois, comme l'introduction du 4e mouvement. Cependant des effets tirés visiblement de la musique nordique, du wagnérisme (qui a même origine) et aussi des effets tirés de l'école russe. Pas nouveau par rapport à l'époque et même en-deça des effets symphoniques hallucinants développés par le magicien de l'orchestre, Il professore, le maestro par excellence, bien sûr, Rimski. En deça même des avancées fulgurantes de Ries vers le pseudo-impressionnisme musical, et en deça des réussites les plus foudroyantes de Bruckner. Bruckner, beaucoup plus brut de décofrage parfois, parfois sommaire, mais jamais vulgaire. Mahler largement en retrait par rapport au développent du style nordique tel qu'il s'exprime dans la Symphonie n°1 de Sibelius. Sans contester l'originalité de cette symphonie n°6 de Mahler, il apparaît évident qu'elle véhicule de nombreux effets issus des œuvres les plus avancées de l'époque et qu'elle en constitue plutôt une réutilisation dans un cadre plus archaïsant, celui du style post-viennois. Mahler ne s'affranchira jamais de cette poisse symphonique un demi-siècle après son obsolescence, et il en rajoute. Navrant parfois. Sur l'ensemble, une utilisation instrumentale originale, à dominante de cuivres et de percussions, sans cacophonie, mais, on peut le regretter, sans cette finesse qui caractérise les meilleurs chefs-d'œuvres symphoniques. Soyons juste néanmoins. Des thèmes presque toujours superbes, presque sans interruption, pour une œuvre très longue (le dernier mouvement atteint 30 minutes dans cette interprétation). Mais malheureusement, çà et là, des vulgarités regrettables. A part cela, que peut-on critiquer dans cette symphonie? Un 3e mouvement lent thématiquement un peu insuffisant, un quatrième mouvement trop monumental: la folie des longueurs selon le principe: plus une symphonie est longue, plus elle est profonde, plus elle est géniale. L'étirement du temps: aussi une découverte de la musique nordique qu'on a trop facilement accordé aux vedettes musicales en place, Wagner au premier chef après un siècle de mépris à l'égard de la musique nordique. Rendons à Halvorsen, Grieg, Gades, Berwald, Aulin, Sibelius... l'origine et l'exploitation de découvertes que d'autres se sont accaparés, même si on doit parfois reconnaître aussi leur génie.

Symphonie n°7 1904    (**/*/**/*/*)

La symphonie n° 7 de Mahler, pas une mauvaise symphonie à mon avis: de la substance, oui, mais rares passages excellents, dont le thème principal, très sporadique, du premier mouvement. Et surtout: longue traversée du désert - désert thématique - en seconde partie dans ce premier mouvement démesurément long (25 minutes environ). En revanche, un mouvement plus égal (le 4e) dans le style viennois le plus rococo. À signaler - caractéristique étonnante - quelques velléités de rhapsodisme (de nature indéterminé). Mahler, un compositeur aux antipodes du rhapsodisme, englué dans le symphonisme autrichien post-classique, même s'il est renouvelé par une certaine coloration wagnérienne et une once de modernisme... qui dérive à mon avis vers des effets bruyants. Le caractère bruyant dans la symphonie: souvent, une manière pour un compositeur, d'éviter d'admettre son propre vide et masquer son absence d'inspiration. Le cas, me semble-t-il, dans le dernier mouvement de cette symphonie 7. Et malheureusement, dans cette œuvre, des témoignanges de la vulgarité malhérienne, en particulier l'intervention des cloches dans ce dernier mouvement... parmi bien d'autres vulgarités. Néanmoins, sur l'ensemble, je pense que Mahler aurait pu tirer une symphonie honnête à partir de tout ce fatras en l'élaguant au lieu de l'allonger selon la mode de l'époque. Une mode selon laquelle plus on est long, plus on est profond.

Symphonie n°9 1909    (-/-/-/*)

Cette très longue, trop longue à mon goût, symphonie, relève d'un style romantique assez pur, évitant les outrances instrumentales dont à mon avis Mahler nous gratifie parfois. Le ton paraît anecdotique, ne recélant aucune tension (sauf peut-être dans le dernier mouvement), ce qui contraste singulièrement avec la Symphonie n°10. Le premier mouvement (Andante comodo) me semble un essai vers un pseudo-impressionniste guère convaincant. Le quatrième mouvement (Adagio) est constitué presqu'entièrement de longues tenues aux cordes assez wagnériennes. A mon avis, quelques beaux crescendos bien rehaussés par les roulements de timbale émergent de cette trame thématique assez floue.

Symphonie n°10 inachevée 1911    (****/**/***/**/***)

La Symphonie n°10 me paraît une œuvre symphonique majeure, particulièrement émouvante et originale. Elle contraste considérablement avec les symphonies n°4, n°5 ou n°9, tant par sa valeur à mon avis que par le style qui s'affirme ici réellement post-wagnérien, au sens le plus positif du terme. Mahler me semble avoir véritablement transcendé Wagner (tout au moins ce que l'on considère comme le style wagnérien), non seulement par la forme, mais par l'esprit, atteignant la profondeur, la subtilité la plus élevée qui se puisse concevoir à mon sens. Le premier mouvement, le plus wagnérien, le plus élaboré à mon avis, exploite le contraste entre un thème mélodique développé aux cordes, d'une lenteur précisément wagnérienne avec un thème en style de menuet, plus léger, remarquablement orchestré. L'ensemble évolue vers un crescendo pathétique. Un second crescendo débutant par des accords pathétiques à l'orgue aboutit à un passage très original, purement malhérien (notamment une tenue de trompette fortissimo), qui m'apparaît ici très réussi (alors que ce type d'instrumentation est souvent à mon avis générateur d'incongruité dans les autres symphonie du compositeur). Le retour du thème lent, presque figé, atteint une grande intensité, rejoignant les développements impressionnistes de Sibelius. On y remarquera des glissandi de cordes étonnants et à mon avis bienvenus. Le second mouvement exploite un excellent thème d'allure burlesque, qui cependant se dissout à mon avis en développement fastidieux, malgré la rutilance de l'orchestration. Le 3ème mouvement, assez bref, en revanche, de style bucolique, se développe avec une virtuosité orchestrale assez extraordinaire. Le dernier mouvement, d'une extrême originalité lui aussi, débute par une suite de frappements espacés de timbale entre lesquelles l'orchestre émet des figurations quasi-impressionnistes en sourdine. Une mélodie pathétique est exposée à la flûte, puis aux violons. La suite se développe sur une thématique un peu lâche, essentiellement aux cordes.

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